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ANIBARA

Association humanitaire et scientifique pour le Burkina Faso.

L’association s’est basée depuis sa création sur la construction et la mise en œuvre d’un petit campement au sud ouest du Burkina, près de Banfora : le Tilapia.
L’écotourisme et les expéditions scientifiques sont les ingrédients du succès de ce petit campement.
L’association cherche aussi à favoriser les échanges scientifiques entre les muséums de Ouagadougou et de Paris.
L’association vise également à promouvoir l’écotourisme et l’environnement, en diffusant des plaquettes dans les offices de tourisme et dans les associations naturalistes françaises.

Siège : Quartier Saint Pancrace, 3241 route de Très 06440 l’Escarène
anibara@hotmail.fr

Parthénogenèse chez les phasmes
samedi 11 novembre 2006
par brunob

P.E. Roubaud

LE MONDE DES PHASMES n° 21 (Mars 1993)

La reproduction parthénogénétique existe dans de nombreux groupes d’animaux. Elle a été observée chez les insectes, tels que les Orthoptères, Hyménoptères et Lépidoptères. Chez les vertébrés on peut observer des cas de parthénogenèses rudimentaires, où le développement de l’embryon s’amorce mais ne se poursuit pas.

Selon les espèces, les phasmes peuvent se reproduire suivant deux modes :
- La reproduction sexuée, nécessitant l’accouplement d’un mâle et d’une femelle facilement reconnaissables par l’important dimorphisme sexuel qui les sépare.
- La reproduction parthénogénétique qui consiste en un développement jusqu’à son terme d’un ovule vierge. C’est à dire d’un ovule non fécondé par un spermatozoïde. Cette reproduction se caractérise pas la succession de générations, ne comportant que des femelles.

NB : Chez les phasmes encore une fois rien n’est simple, hormis la reproduction sexuée classique mettant en jeu mâle et femelle et la parthénogenèse thélytoque ne mettant en jeu que des femelles, l’étude du groupe Bacillus a montré l’existence de 3 modes reproductifs supplémentaires que sont l’androgenèse, la gynogenèse et l’hybridogenèse

Ce dernier mode de reproduction faisant l’objet de cet article présente un intérêt tout particulier chez les phasmes. Ces insectes présentent deux types différents de parthénogenèse :

  • La parthénogenèse géographique : dans une espèce donnée, il existe deux groupes. L’un est dit amphimixique [1] et l’autre parthénogénétique. Ce dernier peut retrouver un mode de reproduction sexué en cas de réapparition ou de réintroduction de mâles. Les deux groupes , amphimixique et parthénogénétique, occupent le plus souvent des territoires distincts. (Cf. Leptynia hispanica)
  • La parthénogenèse constante : les individus se reproduisent indéfiniment par parthénogenèse thélytoque [2].

Nous allons définir ici, les différences qui existent entre les deux types de parthénogenèse, tout en précisant un troisième mode de reproduction utilisé par certaines espèces qui se reproduisent à la fois par gamogénèse [3] et par parthénogenèse (observé dans les élevages).

1) LA PARTHENOGENESE GEOGRAPHIQUE

L’observation d’une espèce française de Bacillus rossius (Rossi, 1790) révèle l’absence totale de mâle. Cette espèce se reproduit donc par parthénogenèse.

Une étude menée en Afrique du Nord (Chopard, 1943) démontre la présence chez la même espèce d’une proportion égale de mâles et de femelles. Il y a donc dans la même espèce et selon la répartition des populations, deux types de reproduction.

Le croisement d’une femelle issue d’une population parthénogénétique française avec un mâle algérien a donné 50% de mâles et 50% de femelles (Favrelle et De Vichet ; 1937 et 1948). Cet exemple est un cas typique de parthénogenèse géographique. Ce type de parthénogenèse semble donc conduire au cours de l’évolution à deux types géographiques très peu différents du point de vue morphologique.

Voir à ce sujet les travaux de Scali et al

L’étude menée par Cappe de Bâillon, Favrelle et De Vichet (Cappe de Bâillon Favrelle et De Vichet, 1934-1938, Cappe de Bâillon et De Vichet. 1940) sur des espèces pouvant au cours de leur évolution créer des "races" parthénogénétiques par suite d’un isolement géographique, révèlent donc deux catégories différentes :

  • des espèces bissexuées ou l’isolement des femelles crée une parthénogenèse qualifiée d’accidentelle (retour possible à une reproduction sexuée). C’est le cas qui vient d’être étudié dans la parthénogenèse géographique de B. rossius.
  • des espèces qui se reproduisent indéfiniment par parthénogenèse thélytoque c’est à dire des espèces où l’on ne connaît que des femelles, le retour à une reproduction sexuée étant impossible. C’est la parthénogenèse constante.

2) LA PARTHENOGENESE CONSTANTE

L’exemple le plus significatif de parthénogenèse constante est celui observé chez Carausius morosus (Sinéty , 1901).

Les oeufs provenant des Indes, obtenus par le Professeur Pantel (Pantel, 1908) ont donné des femelles et des mâles. Mais ces derniers sont morts rapidement et depuis l’espèce se reproduit parthénogenétiquement (l’Abbé Foucher, 1916). Il est donc établi que la parthénogenèse de cette espèce provient de l’isolement fortuit d’une où plusieurs femelles bissexuées au cours de l’évolution. Cappe de Bâillon (Cappe de Bâillon, 1926) a trouvé chez cette espèce une différence notable de l’organe préoperculaire en comparant un individu de son élevage aux tous premiers insectes introduits en Europe (1908). L’insecte issu de ces élevages présentait une disparition au niveau de cet organe de la saillie médiane et des poils raides. (voir figure n°1 suivante).

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Fig. 1 : Carausius morosus (Sinéty) : Organe préoperculaire vu par la face sternale
  • en A : le type n° 23781 de la collection de Brunner von Wattenwyl (Musée de Vienne) ;
  • en B : un exemplaire élevé en captivité. (Dessins d’après Cappe de Bâillon)

Une comparaison avec le type déposé au Muséum d’Histoire naturelle de Vienne a révélé les mêmes différences (voir figure n°1 page précédente). Cette modification de l’organe pré operculaire est à l’origine des échecs des accouplements tentés entre des mâles des Indes et des femelles d’élevage français.

3) CRITERE D’APPARTENANCE AUX DIFFERENTS TYPES DE PARTHENOGENESES

On s’aperçoit donc rapidement que si on se limite à constater l’absence ou la présence des mâles au cours des cycles de développement, les limites entre la parthénogenèse géographique et constante restent très mal définies. Un autre critère de discontinuité entre ces deux groupes apparaît lors de l’observation des oeufs non fécondés : chez les femelles que l’on définit comme appartenant à une parthénogenèse constante, le taux d’éclosions de ces oeufs est 80 à 90% , alors qu’il est de 4 à 44% chez les femelles à parthénogenèse géographique.

Si cette première approche permet de dégager les deux grands cas de parthénogenèse, il reste une autre possibilité à envisager.

4) LA PARTHENOGENESE "FACULTATIVE"

C’est le cas où le mode de reproduction alterne entre parthénogenèse et gamogenèse bien que les mâles soient présents en permanence. Cette possibilité très connue des éleveurs, s’observe chez les individus élevés dans une même cage où les mâles et les femelles sont présents. Par exemple : les femelles de Medauroidea extradentata Brunner, 1907 semblent choisir au hasard l’un des deux modes de reproduction.

S’il nous est possible d’étudier la parthénogenèse, il est beaucoup plus difficile d’en établir les causes. Si la température et l’hygrométrie jouent un rôle important dans son apparition, il ne fait aucun doute que d’autres facteurs interviennent.

La recherche de modèles performants et compatibles avec les conditions d’élevage, conduit à la prospection intensive des milieux naturels forestiers et à la découverte d’espèces nouvelles qui permettront d’élargir au maximum le champ de ces recherches.


BIBLIOGRAPHIE

  • Favrelle, M., G., De Vichet (1937) : Résultat de la fécondation par le mâle d’Algérie des femelles parthénogénétiques française de Bacillus rossii (Phasmidae). C.R. Acad. Sci.. 226 : 1899-1900.
  • Bergerard, J. (1916) : Etudes biologiques sur quelques Orthoptères. Extrait du Bulletin de la Société Nationale d’Acclimatation de France.
  • Cappe de Bâillon, P. (1926) : Variation et parthénogenèse. Bull. Biol. Fr. Belg. 60 (4) : 473- 482.
  • Cappe de Bâillon, P., M., Favrelle, G., De Vichet (1934 a) : La parthénogenèse des phasmes. C. R. Acad. Sci. Paris. Sér. D. 199 : 1069-1070.
  • Cappe de Bâillon, P., M., Favrelle, G., De Vichet (1934 b) : Parthénogenèse et variation chez les phasmes. I. Baculum artemis Westw., Carausius theiseni n. sp. Bull. Biol. Fr. Belg. 68 : 109-166.
  • Cappe de Bâillon, P., M., Favrelle, G., De Vichet (1935) : Parthénogenèse et variation chez les phasmes. II. Carausius furcillatus Pant., Menexenus semiarmatus Westw. Bull. Biol. Fr. Belg. 69 : 59-104.
  • Cappe de Bâillon, P., M., Favrelle, G., De Vichet (1937) : Parthénogenèse et variation chez les phasmes. III. Bacillus rossii Rossi, Epibacillus lobipes Luc., Phobaeticus sinetyi Br., ParasosobiaparfaRedt., Carausius rotundatolobatus Br. Bull. Biol. Fr. Belg. 71 : 129-165., PI. II.
  • Cappe de Bâillon, P., M., Favrelle, G., De Vichet (1938) : Parthénogenèse et variation chez les phasmes. IV. Discussion des faits. Conclusions. Bull. Biol. Fr. Belg. 72 : 167-212.
 
Post Scriptum :
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[1] amphimixique : race dont les gamètes mâle et femelle ont fusionné, avec appariement de leurs chromosomes. C’est le phénomène principal de la fécondation ; son résultat est l’oeuf fécondé.

[2] parthénogenèse thélytoque : parthénogenèse dont tous les descendants sont des femelles.

[3] gamogénèse : reproduction bissexuée.