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Le Monde des Insectes

Le site et le forum insecte.org sont le lieu de rencontre de tous les passionnés d’insectes, quels que soient leur niveau, leur approche et leurs objectifs.

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Il privilégie un esprit de convivialité, sans imposer de hiérarchie officielle, pour que les discussions puissent s’enrichir librement aussi bien des erreurs des uns que des explications patientes de ceux qui en connaissent plus.

ANIBARA

Association humanitaire et scientifique pour le Burkina Faso.

L’association s’est basée depuis sa création sur la construction et la mise en œuvre d’un petit campement au sud ouest du Burkina, près de Banfora : le Tilapia.
L’écotourisme et les expéditions scientifiques sont les ingrédients du succès de ce petit campement.
L’association cherche aussi à favoriser les échanges scientifiques entre les muséums de Ouagadougou et de Paris.
L’association vise également à promouvoir l’écotourisme et l’environnement, en diffusant des plaquettes dans les offices de tourisme et dans les associations naturalistes françaises.

Siège : Quartier Saint Pancrace, 3241 route de Très 06440 l’Escarène
anibara@hotmail.fr

Bangladesh 1999
jeudi 9 février 2006
par Nicolas C
texte de Nicolas Cliquennois

De la mi-juillet à la mi-août, je me trouvais au Bangladesh où les inondations n’étaient pas catastrophiques, contrairement à celles de l’année précédente. Il m’a donc été possible de me déplacer à ma guise dans le pays et d’aller visiter les endroits qui m’étaient restées inaccessibles lors de mon précédent voyage. Cela m’a permis de trouver trois espèces que je n’avais jamais rencontrées dans mes recherches antérieures.

I- Forêt de Modhupur

Cette forêt sèche de mousson est située au nord du pays ; elle est l’unique vestige de l’immense forêt qui couvrait jadis la plaine du Bengale. Malheureusement elle est elle-même très dégradée : il ne subsiste plus grand chose de la forêt originelle et les plantations qui lui ont succédé sont très menacées par la pression démographique et une politique de protection notoirement défaillante.

Vu l’éloignement géographique des régions que j’avais prospectées auparavant et la différence de climat (la mousson y est moins abondante), j’espérais trouver de nouvelles espèces, mais les quelques heures de recherches diurnes et nocturnes que j’ai effectuées sur deux journées ne m’ont permis de trouver que deux espèces déjà rencontrées :

- Trachythorax maculicollis : commun sans être abondant. Cette espèce vit sur Sreblus asper (Moracées) comme c’est déjà le cas dans la région de Chittagong.

- Baculum sp. (Bangladesh 2) : très commun. Il est à noter que l’on trouve deux colorations nettement tranchées parmi cette espèce : une partie des femelles sont vert clair à l’instar des spécimens trouvés dans la région de Chittagong et à Lawachora, les autres étant nettement brun foncé. Mais je n’ai pu constater aucune différence morphologique et les œufs paraissent parfaitement identiques.

La plupart des spécimens sont parasités : on peut constater à l’œil nu la présence d’une ou de plusieurs petites boules brunes de 0,5 à 1,5 mm environ en différents endroits du corps. Ayant ôté ces parasites des spécimens prélevés et les ayant placés dans une petite boîte en plastique transparent, je les ai d’abord vus se déplacer lentement puis rester immobiles quelques jours plus tard. Je les croyais morts jusqu’à ce que je découvre de minuscules "araignées" qui couraient en tous sens dans cette boîte...

Les plantes nourricières de cette espèces sont principalement Mallotus philippensis (Euphorbiacées), Bridelia retusa et Bridelia roxburghiana (Euphorbiacées). J’ai également vu un spécimen qui se nourrissait de Clerodendrum sp. (C. janicum ?, Verbénacées). Il est possible que Zizyphus rugosus (Rhamnacées) soit également à leur menu, mais mes notes de voyages sont trop évasives à ce sujet...

II- Forêt des Sundarbans

Les Sundarbans (shoun-dor-bon : "belle forêt" en bengali) constituent la plus vaste mangrove du monde : deux tiers de cette forêt sont situés au Bangladesh, le dernier tiers étant en Inde. L’endroit est réputé pour les tigres du Bengale (entre trois et quatre cents) qui y vivent encore.

L’on m’avait dit que la frange nord des Sundarbans était constituée d’une forêt tropicale "normale". Sur place, force m’a été de constater que cela n’était pas le cas : tout le sol de la forêt est noyé sous les eaux à la marée montante. Il en résulte que la végétation arbustive est presque totalement inexistante. De ce fait, il m’a paru vain de m’aventurer à effectuer des recherches.

Cependant, M. Rafiqul Rahman, chef de la section entomologique à l’Institut de Recherche Forestière, m’a indiqué qu’il existait des zones broussailleuses à l’intérieur des Sundarbans et qu’il croyait y avoir déjà vu des phasmes lors de ses recherches sur un parasite du bois. Il m’a promis, au cas où cela serait avéré, d’en capturer les prochaines fois qu’il se rendrait sur place.

Mais il ne semble pas que l’on ait jamais trouvé de phasme dans une mangrove, ce qui n’a rien de surprenant au vu des conditions très particulières qui y règnent. Peut-être peut-on concevoir qu’une espèce arboricole qui collerait ses oeufs aux feuilles ait pu s’y adapter ?

III- Région de Sylhet

Située au nord-est du Bangladesh, cette région est connue des spécialistes des phasmes pour la dizaine d’espèces qu’on y a trouvée au siècle dernier. Beaucoup de ces espèces m’étaient encore inconnues malgré les recherches que j’avais déjà effectuées au sud de cette région les deux années précédentes. Je me suis donc rendu dans la partie nord afin de tenter de les retrouver au cas où elles auraient survécu à la déforestation.

J’ai commencé ma prospection à Sylhet même : au nord-est de la ville se trouvent quelques collines boisées (deux forêts minuscules, séparées par quelques centaines de mètres, dont une primaire mais fortement dégradée, l’autre secondaire et plantée de sal (Shorea robusta) ). J’y ai trouvé cinq espèces dont deux nouvelles pour moi :

- Sipyloidea sipylus : très commun. Ses plantes nourricières n’ont pu être identifiées, mais c’est un phasme très polyphage.

- Bangladesh 16 : Medaura scabriuscula (Wood-Mason 1873) : une femelle adulte présentant dorsalement une bande rouge centrale et une tache bleu encre sur le mésonotum. En captivité, elle a accepté immédiatement Allophyllus cobbi que j’avais recueilli sur place.

- Trachythorax maculicollis : une femelle immature sur Streblus asper.

- Bangladesh 14 : Oxyartes despectus (Westwood 1859) : une femelle adulte. L’échantillon de saplante nourricière que j’avais prélevé n’a pu être identifié.

- Bangladesh 18 : Baculum magnum (Brunner 1907) : deux mâles adultes. Plante hôte inconnue.

Ensuite, je me suis rendu à Khadimnogor, à 12 km au nord-est de Sylhet. Les plantations y sont nombreuses, mais ne présentent guère d’intérêt pour le chercheur de phasmes avec leur végétation arbustive souvent malingre ou avec leurs fourrés de bambous. Néanmoins j’ai découvert quelques exemplaires de Sipyloidea sipylus à Kalagul Bangan, où ils se nourrissent de Microcos paniculata (Lauracées) (et peut-être de Leea alata (Vitaccae)), ainsi qu’à Borjon Bagan (sur une plante non identifiée qu’il a accepté en captivité) où j’ai trouvé également deux femelles immatures de Rhamphophasma spinicorne dont les "cornes" étaient très développées. L’une se trouvait sur la même plante (non identifiée) que les S. sipylus, l’autre sur Calliandra umbrosa ; elles ont effectivement consommé ces deux plantes en captivité.

Puis, je suis allé plus au nord, à Jaflong, ville frontalière avec l’état indien du Meghalaya. Là, le désenchantement fut total car du côté bangladéshi ne se trouvent guère que des plantations d’eucalyptus malingres, quand du côté indien se dressent les monts du Meghalaya recouverts d’une forêt tropicale encore intacte... J’y ai trouvé malgré tout trois femelles adultes de Sipyloidea sipylus sur deux plantes non identifiées dont une a effectivement été acceptée en captivité). Une des femelles était parasitée (elle présentait une petite boule rouge).

Enfin, je suis redescendu un peu plus au sud, à Sharighat où s’étend une chaîne de collines isolée dans la plaine. Ces collines sont recouvertes d’eucalyptus plus âgés qu’à Jaflong et de quelques "jardins" de teks. La végétation arbustive est souvent très dense et seuls quelques chemins étroits taillés pour le passage et la paissance des vaches permettent d’y pénétrer. J’y ai trouvé cinq espèces qui s’y rencontrent souvent en abondance.

- Sipyloidea sipylus : très commun.

- Oxyartes despectus : quelques mâles adultes mais pas de femelle.

- Medaura scabriuscula : mâles et femelles s’y trouvent en grand nombre. Les femelles présentent une palette de couleurs assez étendue dans les bruns et les rouges. Je les ai notamment trouvés sur une plante non identifiée. J’ai aussi capturé un spécimen en train de se nourrir d’Eupatorium odoratum (Compositae). En captivité, ils ont accepté Caesalpina cucullata.

- Bangladesh 15 : Baculum stilpnum (Westwood 1859) : beaucoup de mâles et de femelles sur une arbuste épineux (Caesalpina cucullata (Sapindacées)).

- Bangladesh 17 : Phryganistria virgea (Westwood, 1848) : quatre femelles subadultes mais pas de mâle.

- J’avais également récolté un mâle (en train de manger une fougère : Christella dentata (Thelypteridaceae)) d’une espèce appartenant probablement à la tribu des Lonchodini, mais il a malheureusement été dévoré en captivité par des fourmis .