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Le site et le forum insecte.org sont le lieu de rencontre de tous les passionnés d’insectes, quels que soient leur niveau, leur approche et leurs objectifs.

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Il privilégie un esprit de convivialité, sans imposer de hiérarchie officielle, pour que les discussions puissent s’enrichir librement aussi bien des erreurs des uns que des explications patientes de ceux qui en connaissent plus.

ANIBARA

Association humanitaire et scientifique pour le Burkina Faso.

L’association s’est basée depuis sa création sur la construction et la mise en œuvre d’un petit campement au sud ouest du Burkina, près de Banfora : le Tilapia.
L’écotourisme et les expéditions scientifiques sont les ingrédients du succès de ce petit campement.
L’association cherche aussi à favoriser les échanges scientifiques entre les muséums de Ouagadougou et de Paris.
L’association vise également à promouvoir l’écotourisme et l’environnement, en diffusant des plaquettes dans les offices de tourisme et dans les associations naturalistes françaises.

Siège : Quartier Saint Pancrace, 3241 route de Très 06440 l’Escarène
anibara@hotmail.fr

Les phasmes du Bangladesh
Première partie
jeudi 9 février 2006
par Nicolas C

texte de Nicolas Cliquennois

dessins de Nahreen Farjana Shurobhi

Introduction :

En février 1996, je débarquai pour deux ans au Bangladesh afin d’y effectuer mon service national dans la coopération. Déjà passionné de phasmes, je comptais bien mettre à profit mon séjour en recherchant les espèces de ce pays qui semblent à peu près inconnues en Europe. Après des débuts un peu laborieux, n’ayant alors pas la moindre expérience dans ce domaine et les gens d’ici ignorant jusqu’à l’existence des phasmes (qu’ils prenaient au choix, à la vue des photos que je leur présentais, pour des sauterelles, des papillons, des libellules ou des cafards...) et me fournissant beaucoup d’informations fantaisistes, je trouvais enfin mon premier phasme par un heureux hasard. Par la suite, mes recherches s’avérèrent un peu plus faciles que je ne l’aurais cru tout d’abord ; la principale difficulté n’étant pas de trouver les phasmes, mais les forêts !

Première partie : la région de Chittagong

Situation :

Le Bangladesh, ancien Bengale oriental, se situe au carrefour de deux mondes, entre le sous-continent indien et la péninsule indochinoise. La région de Chittagong où j’ai prospecté principalement constitue la partie occidentale de la vieille région Arakanaise. Elle est cernée par la Birmanie, par les provinces indiennes du Tripura et du Mizoram et est baignée par les eaux du golfe du Bengale. Elle appartiendrait plutôt géographiquement à la péninsule indochinoise. Elle contraste avec le reste du pays, vaste plaine constituant le delta du Gange et du Brahmapoutre, par un relief composé de collines s’élevant de plus en plus vers l’est, contreforts de la chaîne Arakanaise. Toutes les collines étaient naguère couvertes de forêts denses ; le sol sableux ne permettant pas la culture du riz en terrasse, on n’éprouvait pas le besoin de les détruire. Mais le problème de la surpopulation a conduit à un déboisement massif, les Bengalis surexploitant la forêt. Maintenant on a replanté à quelques rares endroits, mais le plus souvent avec de l’acacia qui n’est pas indigène. Seule la partie située près des frontières, peuplée de tribus tibéto-birmanes, a peu ou prou échappé pour l’instant au massacre.

Malheureusement cette région est secouée par une guérilla menée par les tribus contre le gouvernement et son accès est soumis à autorisation pour les étrangers (un traité de paix a été signé fin 1997 laissant espérer une ouverture prochaine). Le climat, tropical, se divise en trois saisons principales : l’hiver (octobre-février) est doux et sec, la saison chaude (mars-juin) est beaucoup plus humide, la mousson (juin-septembre) offre des pluies très abondantes (l’endroit le plus humide du monde se situe non loin de là en Assam). Il tombe entre 2500 et 3000 mm d’eau par an dans la région de Chittagong. L’humidité atmosphérique reste élevée toute l’année et culmine pendant la mousson.

Sites :

Tous les insectes que j’ai trouvés proviennent de dix sites : Chittagong, Kodala, Jobra, Chunoti, Malumghat, Ramu, Teknaf, Udalia, Shamirpur et Bandarban.

A Chittagong même, il s’agit de petites collines en pleine ville qui sont restées plus ou moins sauvages ; trois espèces y ont été trouvées (Bangladesh 1, Bangladesh 3 et Bangladesh 8). A Kodala, le site est constitué d’une plantation de teks qui a succédé assez récemment à la forêt primaire ; j’y ai découvert quatre espèces (Bangladesh 2, Bangladesh 3, Bangladesh 5 et Bangladesh 6).

A Jobra, la forêt naturelle a été progressivement remplacée dans les années soixante-dix par des plantations, principalement d’acacia et d’eucalyptus ; la présence de l’université de Chittagong à cet endroit le protège un peu contre les armées de coupeurs de bois qui sévissent pour détruire le peu qu’il y a à préserver dans ce pays ; j’y ai recensé cinq espèces (Bangladesh 1, Bangladesh 3, Bangladesh 4, Bangladesh 7 et Bangladesh 8).

Chunoti est une forêt primaire très dégradée souvent envahie par les bambous : cinq espèces y cohabitent (Bangladesh 3, Bangladesh 4, Bangladesh 5, Bangladesh 6 et Bangladesh 9). Malumghat est également une forêt primaire, mais elle a perdu son aspect sauvage ; j’y ai découvert deux espèces en un seul exemplaire (Bangladesh 1 ou Bangladesh 4 et Bangladesh 3).

Ramu est une forêt secondaire avec une végétation basse très touffue ; je n’y ai trouvé qu’un seul phasme (Bangladesh 3).

A Teknaf se trouve une forêt primaire très bien conservée (présence d’éléphants sauvages) ; j’y ai rencontré deux espèces (Bangladesh 2 et Bangladesh 3).

Udalia est une plantation de thé où j’ai capturé un phasme dans les fourrés voisins (Bangladesh 1).

Shamirpur est un village avec beaucoup d’arbres où je n’ai également trouvé qu’un seul phasme (Bangladesh 1).

Quant à Bandarban (une espèce : Bangladesh 2), je ne connais pas le lieu de capture car il est situé dans la zone tribale touchée par la guérilla ; pour prospecter dans cette région beaucoup moins touchée par la déforestation, j’ai dû employer un Bengali (travaillant à la section Entomologie de l’Office de la forêt de Chittagong où l’on trouve une belle collection d’insectes, les quelques spécimens de phasmes étant malheureusement très mal conservés) avec des résultats très médiocres. Tous ces lieux de chasse se situent sur des collines plus (Teknaf) ou moins (Malumghat et Ramu) hautes (au grand maximum 250 mètres, à vue de nez...) et escarpées car les plaines sont entièrement occupées par les rizières.

Prospection :

J’ai toujours prospecté de jour, car il est difficile de circuler dans la campagne la nuit et impossible de loger sur place. La première chose à entreprendre est de repérer des buissons présentant des traces de mangeures caractéristiques des phasmes et de scruter partout, sur ou sous les feuilles, sur les tiges, dans les entrelacs de branches dénudées au cœur du massif, etc. Une fois repérée la plante hôte et connues les habitudes de camouflage diurne de l’espèce de phasme recherchée, la recherche se révèle souvent assez facile. Pour les espèces pourvues d’ailes, c’est plus simple car un simple battage du buisson provoque généralement l’envolée d’un ou plusieurs spécimens. J’ai aussi utilisé la méthode dite du parapluie japonais qui s’est parfois révélée fructueuse. Le problème principal est de se protéger contre les moustiques et, beaucoup plus insidieux, contre les sangsues qui pullulent dans certains endroits. Les piqûres de fourmis rouges ne sont pas non plus des plus agréables...

Biologie :

On trouve évidemment le plus grand nombre de phasmes dans les forêts, mais j’ai aussi trouvé Bangladesh 1 (en un seul exemplaire à chaque fois) dans deux zones cultivées (Udalia et Shamirpur). J’ai croisé seulement deux phasmes (Bangladesh 1 et Bangladesh 4) se tenant sur le bord de hauts fourrés, loin des arbres (respectivement à Udalia et à Chunoti). Leur habitat préféré semble être les zones de forêts secondaires (comme Kodala et Jobra) avec une végétation basse moyennement touffue. Ils semblent beaucoup plus rares dans les forêts primaires où je n’en ai jamais trouvé que sur la bordure. On peut aussi avancer l’hypothèse que, dans les forêts secondaires les espèces d’arbres replantés n’étant généralement pas autochtones, les phasmes n’y grimpent pas et se tiennent exclusivement au niveau de la strate arbustive où se situent les essences locales qu’ils consomment, alors que dans la forêt primaire ils peuvent trouver à se nourrir plus en hauteur et échapper ainsi aux recherches du prospecteur.

Les plantes hôtes sont peu variées : celle abritant le plus grand nombre d’espèces de phasmes est l’assargatch (Microcos paniculata (Tiliacées) ) qui est très commun ; il se présente le plus souvent sous forme de buissons mais il s’agit bien d’un arbre, tout comme le chéoragatch (Streblus asper Lour. (Moracées) ) qui se rencontre lui aussi souvent sous forme de petits buissons. Ce dernier, selon la croyance bengalie, est censé être la demeure des femmes fantômes !

En plein hiver, on trouve très peu de phasmes ; il s’agit alors de quelques vieux spécimens ayant survécu jusque là et promis à une mort prochaine ou de jeunes précoces qui semblent avoir peu de chance de survivre si le biotope ne tempère pas les conditions climatiques quand celles-ci sont très défavorables. L’arrivée du printemps (fin février), caractérisé par une hausse brutale des températures et la chute des premières pluies, marque le début de l’éclosion massive des œufs. Les jeunes se développent pendant toute la saison chaude et atteignent l’âge adulte pendant la mousson. C’est à cette époque que les populations d’adultes sont les plus importantes, mais l’on peut trouver quelques rares adultes dès le mois de mars. Ces données générales varient évidemment selon l’environnement immédiat (exposition, humidité résiduelle, nature de la plantation, etc.) et plus encore selon les espèces. Par exemple, il n’y a qu’une génération de Bangladesh 2 par an (incubation et développement lents) contre au moins trois générations de Bangladesh 8 (incubation et développement très rapides).

Autre facteur climatique : les cyclones. La région de Chittagong est très exposée à ce genre de catastrophe qui semble être de peu de conséquence pour les phasmes : le gros cyclone qui a frappé en mai 1997 n’a apparemment eu aucun impact sur les populations.

Espèces découvertes :

A ma connaissance, la région de Chittagong, contrairement à celle de Sylhet au nord-est du Bangladesh, n’avait jamais été l’objet d’une étude sur les phasmes. Il n’existait donc aucun document sur les espèces présentes dans cette zone. De février 1996 à janvier 1998, j’ai pu y trouver 9 espèces, dont 6 aptères et 3 ailées. Pour établir un classement, j’ai donné à ces espèces le nom du pays suivi du chiffre correspondant à l’ordre de leur découverte. Leur identification est encore en cours, celle qui est proposée est donc toute provisoire ; elle a été réalisée par Paul Brock.

Bangladesh 1 : Rhamphophasma spinicorne (Stål) - P.S.G. n°194

C’est un phasme bâton aptère. On le trouve à Chittagong, à Jobra, à Chunoti, à Udalia et à Shamirpur (également signalé à Korerhat par l’Office de la forêt).

La femelle mesure entre 90 et 100 mm, elle est généralement d’un vert clair tirant sur le jaune. Ses antennes sont courtes (environ 12 mm). Son abdomen se termine en une pointe effilée brun clair (ovipositeur). La tête porte deux petites pointes de couleur noire.

Le mâle mesure autour de 80 mm avec des antennes de 21 mm ; il est filiforme. Son corps est brun de couleur générale avec beaucoup de variations. L’extrémité de l’abdomen est bifide.

Les œufs ont la forme de bâtonnets. Ils mesurent 6 mm sur 1,5 mm. Ils sont beiges et l’opercule porte une couronne de poils.

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Rhamphophasma spinicorne (Stål) - P.S.G. n°194
Femelle
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Rhamphophasma spinicorne (Stål) - P.S.G. n°194
Mâle

Bangladesh 2 : Baculum sp. - P.S.G. n°219

C’est un phasme bâton aptère. Il est présent à Kodala, à Bandarban et à Teknaf.

La femelle mesure entre 120 et 125 mm avec une largeur de 4 à 5 mm au niveau des deuxième et troisième segments abdominaux. Elle est d’un vert jaunâtre plus ou moins clair selon les individus (avec de rares spécimens brun clair). Les antennes font entre 15 et 20 mm. L’extrémité abdominale est bilobée. Les spécimens de Teknaf porte deux cornes minuscules sur la tête ; sur ceux de Kodala, on n’en aperçoit qu’un vestige sous la forme d’un trait sombre.

Le mâle mesure plus ou moins 90 mm. Il présente un aspect filiforme. Il est brun de coloration générale, mais le mésothorax et le métathorax sont rouge vif sur le dos et le ventre avec des bandes latérales d’un vert vif (ces couleurs n’ont été constatées que le jour où j’en ai collectés pour la première fois ; ensuite elles se sont ternies à la fois en élevage et dans la nature pour une raison inconnue). L’extrémité abdominale est bifide.

Les œufs sont ronds avec un aspect granuleux très prononcé. Ils mesurent environ 3 mm. Ils sont généralement brun clair mais parfois gris.

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Bangladesh 2 : Baculum sp. - P.S.G. n°219
Femelle
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Bangladesh 2 : Baculum sp. - P.S.G. n°219
Mâle

Bangladesh 3 :Sipyloidea sp. (S. meneptolemeus ?)

C’est un phasme bâton ailé. Il est présent à Chittagong, Jobra, Kodala, Chunoti, Malumghat, Teknaf et Ramu.

La femelle est verte ou plus rarement brune ; elle mesure plus ou moins 88 mm avec des antennes de 62 mm environ. Les ailes font 47 mm, elles débordent légèrement le cinquième segment abdominal ; déployées, elles ont une couleur noirâtre.

Le mâle est plus foncé que la femelle. Il mesure environ 60 mm. Les ailes vont jusqu’au bout du cinquième segment abdominal ; déployées, elles sont d’une belle couleur orangée.

Les œufs sont petits (3 à 3,5 mm de long), ovoïdes avec un opercule plat, bruns ou gris et très nettement ridés.

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Bangladesh 3 :Sipyloidea sp. (S. meneptolemeus ?)
Femelle
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Bangladesh 3 :Sipyloidea sp. (S. meneptolemeus ?)
Mâle

Bangladesh 4 : Rhamphophasma sp.

C’est une espèce très proche de Rhamphophasma spinicorne mais qui s’en distingue notamment par la taille et la couleur (probablement une forme "géante"). La femelle est plus grande et beaucoup plus foncée (avec de plus grandes variations de couleur d’un individu à l’autre (de brun foncé à vert foncé)). La seule chose qui puisse distinguer les mâles des deux espèces est la taille. Les jeunes semblent assez différents : les Bangladesh 1 sont généralement uniformément vert clair tandis que les Bangladesh 4 sont bruns ou noirs avec les pattes plus claires ou présentant des bandes claires sur le fémur. Les œufs semblent tout à fait identiques. Ce phasme se trouve à Jobra, Chunoti et Malumghat.

Bangladesh 5 : Sipyloidea sipylus (Westwood)

C’est un phasme bâton ailé de couleur brune ou jaune paille. Il est localisé à Chunoti et à Kodala.

La femelle mesure 86 mm en moyenne pour une largeur maximale de 5 mm au niveau du métathorax. Les antennes font entre 65 et 70 mm. Les ailes mesurent environ 45 mm et atteignent le milieu du sixième segment abdominal. Déployées, elles présentent une couleur rosâtre. Les exemplaires de Chunoti sont brun orangé avec les ailes jaune paille tandis que ceux de Kodala sont entièrement jaune paille.

Le mâle est une version miniature de la femelle ; il fait environ 60 mm de longueur pour une largeur moyenne de 1,5 mm. Les ailes mesurent aux alentours de 30 mm.

Les œufs sont oblongs, ils font 4 mm de long pour 1 mm de large. Ils sont striés de noir et de blanc. La femelle les colle dans les recoins.

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Bangladesh 5 : Sipyloidea sipylus (Westwood)
Femelle
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Bangladesh 5 : Sipyloidea sipylus (Westwood)
Mâle

Bangladesh 6 : Myronides trilineatus (Carl) P.S.G. n°217

C’est un phasme bâton aptère. On le trouve à Chunoti et à Kodala.

La femelle est généralement brun clair verdâtre, parfois brun foncé. Elle mesure plus ou moins 100 mm pour une largeur maximale de 5 mm au niveau du quatrième segment abdominal. Les antennes font environ 80 mm.

Le mâle est filiforme, brun de couleur générale avec un mésothorax rouge. Il mesure environ 80 mm avec des antennes aussi longues que le corps.

Les œufs sont ronds et noirs.

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Bangladesh 6 : Myronides trilineatus (Carl) P.S.G. n°217
Femelle
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Bangladesh 6 : Myronides trilineatus (Carl) P.S.G. n°217
Mâle

Bangladesh 7 : Medaura sp. - P.S.G. n°202

C’est un phasme bâton aptère. Il est présent à Jobra.

La femelle est généralement brun clair et mesure environ 100 mm pour une largeur maximale de 9 mm au niveau du métathorax. Les antennes sont courtes (autour de 17 mm). Elle porte deux paires de cornes sur la tête et l’ensemble du corps est très granuleux. On trouve de nombreuses excroissances sur les pattes.

Le mâle a une couleur qui varie de brun clair à brun foncé. Le mésothorax et le métathorax présentent une longue bande claire cernée de rouge ou de noir. Il mesure un peu plus de 70 mm pour une largeur générale de 2,5 mm. Les antennes font environ 18 mm.

Les œufs sont ronds et gris.

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Bangladesh 7 : Medaura sp. - P.S.G. n°202
Femelle
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Bangladesh 7 : Medaura sp. - P.S.G. n°202
Mâle

Bangladesh 8 : Trachythorax maculicollis (Westwood) - P.S.G. n°160

C’est un phasme bâton ailé assez trapu. Je l’ai trouvé à Jobra et également à Chittagong, mais là en un seul exemplaire et sous forme d’œufs éclos (également localisé à Lama par l’Office de la forêt).

La femelle est de couleur brun foncé, elle mesure environ 75 mm avec une largeur de 7 mm au niveau du métathorax. Les antennes sont longues (autour de 53 mm). Les ailes mesurent environ 56 mm et vont presque jusqu’au bout de l’abdomen. Ce phasme présente une coloration rouge vif au niveau du pleure réunissant la tête et le thorax, sur le prothorax et le mésothorax au niveau de l’échancrure des hanches et à la base des ailes (coloration seulement visible quand celles-ci sont déployées). La tête est surélevée dans la région de l’occiput. Sur le mésothorax, deux bosses sont nettement visibles.

Le mâle présente les mêmes caractéristiques que la femelle mais il ne porte pas de bosses sur le mésothorax. Il mesure 43 mm en moyenne pour une largeur de 2,5 mm.

La femelle pond les œufs par paquets qu’elle colle sur les feuilles ou sur les branches. Ils sont sphéroïdaux, de couleur crème, et présentent une couronne de poils autour de l’opercule.

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Bangladesh 8 : Trachythorax maculicollis (Westwood) - P.S.G. n°160
Femelle
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Bangladesh 8 : Trachythorax maculicollis (Westwood) - P.S.G. n°160
Mâle

Bangladesh 9 : Carausius sp. ( ?)

La femelle de cette espèce qu’on trouve à Chunoti est inconnue.

Le mâle est filiforme ; il mesure plus ou moins 100 mm pour une largeur de 1,5 à 2,5 mm. Ses antennes font environ 58 mm. Il est brun de coloration générale avec un mésothorax rouge sang sur la face ventrale.

Phyllie

Malgré de nombreuses recherches et de nombreuses enquêtes auprès des zoologistes ou des paysans, je n’ai pas trouvé de phyllie au Bangladesh. Cependant, l’Office de la forêt de Chittagong possède un spécimen (une femelle en très mauvais état...) récolté à Kaptai ; il s’agit vraisemblablement de Phyllium celebicum car cette femelle possède des ailes complètes sous ses élytres. En outre, des botanistes de l’université de Chittagong m’ont affirmé avoir déjà rencontré (mais en de très rares occasions) des phyllies sur le site de l’université (c’est-à-dire à Jobra). Enfin, à Kodala, les paysans interrogés à ce sujet m’ont donné parfois des réponses positives (mais il faut dire que ces gens là ne portent pas le moindre intérêt à ce sujet : quelques uns ne connaissaient même pas les phasmes pourtant très abondants sur ce site) : ceux qui disaient les connaître m’ont dit qu’ils en voyaient parfois sur les goyaviers et les citronniers (ils cultivent ces deux arbres au pied des collines plantées de teks). Un paysan m’a dit qu’il en avait même tué une parce qu’elle mangeait les feuilles d’un goyavier ; il ajoutait qu’il avait alors vu des œufs à l’intérieur du corps de l’insecte. Sur des feuilles de goyavier, j’ai trouvé quelques traces de mangeures tout à fait rondes, assez typiques des phyllies, mais de phyllie, pas la moindre...

Remerciements :

- M. Rafikul Islam, chef de la section Entomologie de l’Institut de Recherche Forestière du Bangladesh à Chittagong pour m’avoir assisté au début de mes recherches.

- Dr M. Khairul Alam, chef de la section Botanique de l’Institut de Recherche Forestière du Bangladesh à Chittagong pour avoir identifié les plantes nourricières des phasmes.

- Paul D. Brock pour s’être penché sur l’identification de ces espèces.

- MM. Alain Deschandol, Claude Lamorille et Jean Treutenaere pour s’être occupés d’établir l’élevage de ces phasmes sous nos latitudes.

- Nahreen pour s’être courageusement proposée à dessiner mes "bébêtes".

- Moloy pour avoir héroïquement bravé les sangsues en ma compagnie.

 
Post Scriptum :

Les phasmes du Bangladesh - addendum

Retour au Bangladesh

Je suis retourné au Bangladesh de la mi-août à la mi-septembre 1998 avec l’intention d’élargir mes recherches à d’autres régions. Mais les inondations catastrophiques qui ont touché le pays m’ont empêché de mener à bien mon projet. J’ai cependant pu recueillir quelques nouvelles données sur les régions de Chittagong et de Srimongol qui, étant vallonnées, ont échappé aux inondations.

Région de Chittagong

- Pendant une promenade nocturne sur une colline au cœur de Chittagong j’ai pu observer de nombreux Trachythorax maculicollis.

- Après la signature du traité de paix, il est beaucoup plus facile pour un étranger de se rendre dans les collines des tribus tibéto-birmanes. Malheureusement, la déforestation y a été bien plus intense que je ne le croyais. J’ai juste découvert une nouvelle localité pour Rhamphophasma spinicorne au sud-est de Bandarban, à Farukpara, le long du torrent Shoïlopropat : j’ai trouvé trois femelles sur une plante appelée bherenda par les autochtones, peut-être du ricin (Ricinus communis (Euphorbiacées)) ou plus sûrement une plante voisine car le ricin est une espèce africaine. Je n’ai pas trouvé de mâles et je dois attendre la génération suivante pour voir si ces femelles ont été fécondées (les résultats pourraient indiquer que sur ce site dégradé cette espèce se reproduit (peut-être) par parthénogenèse). Ces spécimens ont la particularité d’être dépourvus de "cornes" sur la tête.